RESTO BASKET

RESTO BASKET

Un arrêt de bus au beau milieu du grand rien et deux mots qui résonnent toujours comme un mantra : « Le Seum ». C’est sous ce jour là que Resto Basket se présentent à nous à travers leur nouvel EP 7 titres d’excellente facture. Jeune quintette punk rock grenoblois, Resto Basket injectent tant bien que mal depuis 2018 un peu de Californie dans les vastes et froids paysages vallonnés du Dauphiné.

Sans plus attendre : entrevue avec Sylvère et Guillaume, respectivement chanteur et batteur au sein de l’orchestre. Une interview pleine de constats, de doutes et de ska vs stoner.


Bienvenue en « Terres Froides » !


| Propos recueillis par Nino Futur

Commençons par les bases, quand et comment s’est créé Resto Basket. Comment 5 jeunes de campagne grenobloise parviennent à trouver alliance dans un punk rock à la californienne ?
Quelles sont vos influences ?

Vous venez de sortir votre nouvel EP sobrement intitulé « Le Seum » dans lequel on trouve beaucoup de thématiques inhérentes au punk comme l’ennui, l’empathie, le sentiment d’être piégé. Dans quel mood êtes-vous lors de l’écriture d’un texte ?

S : Les morceaux/textes sont presque toujours travaillés par binôme, ça répond souvent à l’ambiance du moment. Le morceau « Sans Plomb » par exemple a été écrit depuis un appart qui donne en plein sur le périph, à force de voir des bagnoles tout le temps il se passe un truc. Les titres sont assez hétéroclites en terme de thématiques, l’EP présente un peu toutes les facettes de ce qui nous tient à cœur.

: On a essayé d’organiser des temps d’écriture collective, mais en vérité il n’y a pas vraiment de façon de faire pour que ça vienne.

S : C’est souvent du ressenti un peu direct, par exemple le morceau « Kérosène » avec la phrase « Les chutes de Kérosène atteignent mon palier » c’est parce que j’ai réalisé qu’on ne se rendait même pas compte d’à quel point tout est niqué jusqu’à l’air qu’on respire. On part d’une petite image et on laisse le truc couler.

On ressent dans l’ensemble de l’EP autant dans les textes que l’artwork ou le clip de « terres froides » une certaine nostalgie autour de la jeunesse. Comme le regret d’une époque où le quotidien ne paraissait pas désenchanté. Est-ce-que vous validez cette hypothèse ?
Ça donne quoi la vie de par chez vous ?

S : Je suis entièrement d’accord, on en a pas mal parlé. On a tous 25 ans, on est tous nés sur le fil du « monde d’avant », on nous a dit qu’on pourrait faire ce qu’on voudrait et on a vu nos pattes se faire casser. Je suis pas en train de dire que je m’en fous, je pense qu’il faut digérer ça et réfléchir à comment faire tourner le monde à l’avantage de toustes.

: Le sentiment que je rattacherais le plus c’est celui de la désillusion, on te vend pleins de trucs sur le travail, la famille, la manière de consommer, le confort, et d’un coup tout est bouleversé par le contexte écologique et social, on a donc pas forcément envie de faire les mêmes choix que nos parents.

S : Et pourtant tu vois on a des diplômes on est pas les plus démunis, mais même avec ça il y a une crise du sens. « A quoi ça sert ? Qu’est ce que tu vas en faire vraiment ? », est-ce-que le monde va me permettre de faire ce que je pensais faire ?

On doit vous le dire assez souvent mais on ressent une influence Zabriskie Point / Justin(e) très palpable dans votre musique, avez-vous grandi en écoutant ces groupes ? Selon-vous cette scène « punk fr 2.0 » a-t-elle apporté quelque-chose de plus au punk dans lequel vous vous identifiez ?

S : C’est arrivé sur le tard, on a découvert tout ça à travers Justin(e) et j’avoue me reconnaître là dedans. Je trouve que toute cette scène post-Zabriskie Point a redonné une légitimité au punk francophone, mais ces groupes-là ont peut-être été un peu trop hégémoniques. 

G : A quel point on peut leur reprocher d’avoir réussi à s’installer et relancer une scène entière ? Ils ont aussi à un moment donné réussi à re-remplir des salles et rajeunir le public punk. En 2015 y’a eu un vrai creux du rock qui s’est marqué, le vent a commencé à tourner et toute cette scène « lyrique » a commencé à s’éteindre 

S : Même si musicalement c’est le genre de formule qu’on propose, même si c’est dépassé, on tient la barque, je pense qu’on peut trouver public avec ça.


On retrouve des influences ska punk 2000’s (« Kérosène », « Terres Froides ») qui couplée à un chant fr rappelle la lointaine époque des Caméléons et de la Ruda ? Êtes-vous de fiers auditeurs de ska dans un ère ou tout le monde écoute du stoner ?

S : Pour nous le ska c’est surtout les influs à l’américaine : Less Than Jake, NoFX, ou alors plus à l’anglaise influence The Clash, les disques de tonton comme je disais… on l’aborde avec un peu d’affection et de gêne.


Le stoner n’aura jamais la vraie dimension sociale qu’a eu le ska. C’est une musique qui s’écoute seul chez soi, qui n’a aucune expérience collective.

Je vais pas te cacher que notre côté ska nous a quand même valu quelques refouls ! Mais pour nous c’est avant tout une musique de fête et d’expérience collective et on veut s’inscrire là-dedans. On a fait la paix avec le fait qu’on soit à contre-courant de la hype.




On note un effort de production sur l’EP signé Kris Banel du Warmaudio de Lyon comment s’est déroulé l’enregistrement de ce dernier, tout était préparé à l’avance ou vous avez pas mal retravaillé durant le studio ?


Vous avez booké une tournée des skatepark français en D.I.Y il y a maintenant deux ans, comment vous était venu ce projet ? vous pouvez revenir dessus ?

Vous êtes un des rares groupes français jeunes dans une scène punk vieillissante, est-ce que vous le ressentez ?
Est-ce que pour vous le punk est désormais un truc de vieux destiné à s’éteindre ou vous pensez qu’il peut se renouveler ?
D’autres groupes jeunes à suggérer ?

S : Alors oui on fait le même constat en effet, y’a une question qu’on se pose très souvent : « y’a qui en France ?? ».

G : Je peux pas me dire que c’est voué à disparaître parce que à chaque concert où je vais-je peux voir que côté public, il y a quelque chose de fort. Il y aura toujours des jeunes qui se greffent, des enfants de punks, des gens du milieu de la teuf qui finissent dans le punk, la scène qu’on connaîtra sera peut être moins grosse et active qu’elle l’eut été. Et je pense que certains groupes comme Mégadef ou Krav Boca peuvent renouveler les choses. Il y a un groupe de Grenoble : Pelle qui commence à monter c’est bien parti pour devenir bien carré dans quelques temps et qui ont une proposition très cool. L’important pour les jeunes groupes c’est de pouvoir se sentir légitime d’essayer !

S : Si on ne veut pas que la scène se casse la gueule, il faut aussi faire de la meilleure musique tout le temps, ne pas se laisser avoir dans un confort…

Peut être que notre musique ne rebat pas les cartes, mais l’important c’est de faire, d’aller au boulot et de se sentir comblé.

Sinon petit shout out à Pondérale de Clermont, groupe tout jeune qui va faire des trucs. Les Crêtes Brulées, groupe de punk acoustique au cœur de l’indé ahah ! Sinon Excellento de Rennes qui ont des trucs à dire, Trholz de Toulouse !

C’est quoi les plans à venir pour un resto basket 2024/2025 ?